Ma mère et moi avions passé la nuit dans un hôtel, dans la ville la plus proche de University of Heart – quel nom de merde, n’oublions pas de le rappeler – puis nous avions rejoint l’établissement un peu avant onze heures, l’horaire qui nous avait été donné par l’administration. J’étais un peu stressée parce que la rentrée, c’est toujours la rentrée, n’est-ce pas, mais surtout énervée pour ma mère qui avait dû prendre un jour de congé pour m’accompagner. C’est quoi l’idée d’avoir une école perdue au milieu de nulle part quand tous vos élèves sont mineurs, n’ont donc pas le permis, ce genre de trucs. Enfin bon, pas comme si j’aurais été motivée à l’idée de venir en bus ce matin, mais au moins ça aurait évité à ma mère de bousiller ses jours de congé dans un road-trip à travers l’Australie juste pour aller à la nouvelle école de sa fille. En vrai, elle ne m’aurait pas laissée partir seule dans un lieu inconnu, elle s’inquiète beaucoup trop pour moi. Et puis on va pas déconner, quelqu’un capable de comprendre le problème si on découvre que le bâtiment est à peine accessible ça me ferait du bien.
Nope Elena ne pense pas à ces questions d’accessibilité de merde c’est pas le moment de s’énerver.
Bref, on est arrivées à l’heure, on a supporté le discours assez bref de la principale (ce qui est tout à son honneur). Il n’y avait pas vraiment beaucoup de parents ici. On venait tous de super loin, après tout, et tout le monde n’avait pas des parents aussi stressés que ma mère.
Le bâtiment était une espèce de château, pas le plus beau que j’aie vu mais ça passait – et c’était quand même assez stylé comme endroit où passer l’année. J’espère que c’est bien chauffé parce que les vieux bâtiments c’est pas toujours ça quand même. On verra bien. Nous sommes entrées dans le hall, très grand avec un gros escalier au milieu et OUI PUTAIN ON DIRAIT UN ASCENSEUR. Oui c’est le minimum, oui j’avais clairement précisé que je me déplaçais surtout en fauteuil et donc ça aurait été complètement con de me prendre sans être suffisamment adaptés mais sait-on jamais. Les gens sont cons.
Nous sommes montées jusqu’au dernier étage, où sont apparemment les chambres. Et………… ce sont des chambres de trois ou quatre. Il y a trois autres filles dans ma chambre. Fleeeemme. J’espère qu’elles sont sympas au moins. Et manifestement, j’étais la dernière arrivée ; les trois autres étaient déjà dans la chambre. Et des lits superposés, youpi. Je salue ma mère, qui comprend qu’il vaut mieux me laisser faire connaissance avec mes nouvelles camarades et dépose donc mes valises, pendant que je commence à parler aux autres.
Hey. Y’a moyen d’avoir un lit en bas, sinon, ou vous êtes déjà trop installées ?

Lorelei, après avoir été hébergée quelques temps quelques temps par un ami australien de son fameux père, allait enfin pouvoir rentrer à University of Heart. Ce n'est pas que son petit séjour chez cet homme était déplaisant, mais c'est qu'elle était seule et qu'elle avait l'impression de déranger ce type qu'elle ne voyait pourtant jamais car il était souvent au boulot. Tout cela pour dire que cela lui faisait du bien d'arriver dans un endroit stable où elle allait pouvoir avoir des relations sociales avec des personnes.
La principale, heureusement, fit un discours assez court mais que Lorelei écoutait d'une oreille distraite, plus captivée par le vieux bâtiment qui formait l'école. Elle a souvent été dans des établissements modernes, donc à part dans les fictions elle avait du mal à concevoir que des gens pouvaient avoir leurs cours dans ce genre d'endroits. Quand la principale (dont elle n'avait pas retenu le nom - Ross quelque chose dans le genre ? elle n'était pas habituée à cet accent-là) termina son monologue elle s'en alla, et Lorelei, trépidante, fut dans les premières personnes à pénétrer dans le bâtiment chercher sa chambre pour poser ses affaires et sauter sur son nouveau lit qu'elle espérait confortable. Elle fut la première à gravir les escaliers et à arriver à l'étage des dortoirs, et elle s'empressa de poser ses yeux sur les listes de noms en espérant trouver le sien. Rien... rien... toujours rien... elle commençait à un peu s'inquiéter, avait-elle été correctement enregistrée ? elle continua encore sur deux portes jusqu'à ce qu'elle aperçut son nom. Elle ouvrit la porte sans attendre ses autres camarades et se jeta sur le premier lit en hauteur (après avoir posé sa valise dans un coin de la salle) pour le tester, même si cela ne servait pas à grand-chose elle devait le faire. Bon. Le matelas allait bien, elle n'allait pas (trop) se plaindre.
Lorelei jeta finalement un oeil aux autres arrivantes : une fille aux cheveux courts kakis, une autre avec de longs cheveux noirs (elle était un peu jalouse de la façon dont ils semblaient être lissés), et elles s'installèrent sur le lit d'en face. Elles eurent le temps de se dévisager quand Lorelei vit une autre fille arriver plus tardivement. Elle avait elle aussi des cheveux blancs (c'est normal ça?) et elle était en fauteuil roulant. Une personne la suivait, celle-ci portait des valises et après un bref regard de la nouvelle arrivante elle s'en alla. Elle leur demanda d'un ton un peu cru (que Lorelei remarqua mais n'en tint guère compte) s'il restait une place sur les lits d'en bas. Instinctivement, la jeune sirène baissa la tête pour regarder en-dessous, après cela elle la releva et sourit à son interlocutrice avant de dire :
Oui ! En dessous de mon lit il y une place libre si tu veux...
Ah oui elle ne savait pas son prénom et c'était un peu embêtant mais toutes les rencontres généralement commençaient comme cela donc ce n'était pas forcément bien grave.